L’agriculture de demain sera précise et durable

L’agriculture va se professionnaliser, devenir plus technique. La transition se fera grâce à des outils de précision. C’est le futur de l’agriculture." Paul Bertaux est le CEO de la start-up Agroptimize, basée au campus d’Arlon (ULg). Fort de vingt-cinq ans d’expérience comme ingénieur agronome, consultant en foresterie et biomasse, il apporte son expertise entrepreneuriale à cette nouvelle start-up qui regroupe l’Université de Liège, le centre luxembourgeois de recherches en sciences en technologies List et l’entreprise française Drone agricole.

Source : La Libre Belgique
Publication date : 05/27/2016

 

Ensemble, ces trois partenaires développent des outils d’agriculture de précision qui aident les agriculteurs à utiliser moins de produits phytosanitaires et d’engrais azotés, dangereux pour l’homme et l’environnement.

Mésinformation à l’usage des pesticides

"Il y a une très forte demande des agriculteurs pour ce genre d’outils. Ils leur permettent en effet de réaliser des économies en pulvérisant moins et aussi de conserver leurs subsides européens conditionnés à une réduction de l’utilisation d’intrants. Il faut savoir que les cultivateurs sont très mal informés sur l’usage des traitements. Ils surutilisent les produits. Leurs principaux conseillers travaillent pour des firmes pharmaceutiques", signale Paul Bertaux.

Comme son nom l’indique, Drone agricole propose des survols des parcelles de blé et de colza afin de les modéliser et d’établir une carte des besoins du sol en azote. De quoi ensuite ajuster la dose de fertilisants car les terres sont loin d’être homogènes. Ses services ne sont commercialisés qu’en France. "En Belgique, la législation sur les drones est encore trop contraignante", souligne le CEO.

Anticiper pour mieux traiter

Les chercheurs belges et luxembourgeois ont, eux, mis au point PhytoProTech. Ce système d’alerte informatique et téléphonique prévient les agriculteurs que leurs cultures vont être touchées par des maladies fongiques ou des ravageurs. "Il existe une autre méthode d’extrapolation mais elle est imprécise et arrive trop tard : quand l’alerte se déclenche, les maladies sont déclarées. Notre approche est beaucoup plus fine, sophistiquée et anticipatrice. Elle utilise des paramètres agronomiques et météorologiques à haute résolution et à l’échelle d’un kilomètre. Les risques sont donc objectivés et on ne traite que quand c’est nécessaire. Les pratiques courantes du secteur sont plutôt de pulvériser systématiquement, totalement et préventivement, sans que cela soit strictement justifié", explique le CEO d’Agroptimize.

 

Ensemble, ces trois partenaires développent des outils d’agriculture de précision qui aident les agriculteurs à utiliser moins de produits phytosanitaires et d’engrais azotés, dangereux pour l’homme et l’environnement.Mésinformation à l’usage des pesticides"Il y a une très forte demande des agriculteurs pour ce genre d’outils. Ils leur permettent en effet de réaliser des économies en pulvérisant moins et aussi de conserver leurs subsides européens conditionnés à une réduction de l’utilisation d’intrants. Il faut savoir que les cultivateurs sont très mal informés sur l’usage des traitements. Ils surutilisent les produits. Leurs principaux conseillers travaillent pour des firmes pharmaceutiques", signale Paul Bertaux.Comme son nom l’indique, Drone agricole propose des survols des parcelles de blé et de colza afin de les modéliser et d’établir une carte des besoins du sol en azote. De quoi ensuite ajuster la dose de fertilisants car les terres sont loin d’être homogènes. Ses services ne sont commercialisés qu’en France. "En Belgique, la législation sur les drones est encore trop contraignante", souligne le CEO.Anticiper pour mieux traiterLes chercheurs belges et luxembourgeois ont, eux, mis au point PhytoProTech. Ce système d’alerte informatique et téléphonique prévient les agriculteurs que leurs cultures vont être touchées par des maladies fongiques ou des ravageurs. "Il existe une autre méthode d’extrapolation mais elle est imprécise et arrive trop tard : quand l’alerte se déclenche, les maladies sont déclarées. Notre approche est beaucoup plus fine, sophistiquée et anticipatrice. Elle utilise des paramètres agronomiques et météorologiques à haute résolution et à l’échelle d’un kilomètre. Les risques sont donc objectivés et on ne traite que quand c’est nécessaire. Les pratiques courantes du secteur sont plutôt de pulvériser systématiquement, totalement et préventivement, sans que cela soit strictement justifié", explique le CEO d’Agroptimize.Depuis l’an dernier, PhytoProTech est en phase de test auprès d’agriculteurs (lire ci-dessous) et dans neuf sites expérimentaux académiques. Une commercialisation est espérée pour 2017. Agroptimize vise une clientèle de fermiers "progressistes, familiarisés avec l’outil informatique et même bios car les agriculteurs sont libres d’utiliser les produits de leur choix" , précise Paul Bertaux. Agroptimize n’est lié à aucune société phytopharmaceutique et s’est protégé contre un éventuel rachat d’une telle firme : il faudra l’accord de tous les actionnaires pour une nouvelle entrée dans son capital. "On pourrait imaginer de nouveaux développements de PhytoProTech : la gestion des mauvaises herbes, les maladies de la vigne, la modulation de la densité des semis", poursuit-il.La révolution Copernicus L'équipe va travailler sur un nouvel outil qui concerne les prévisions de rendements agricoles, à l'échelle de la parcelle puis de toute une région. "Ce système utilisera les données météo fournies par les satellites à haute résolution du réseau européen Copernicus. Elles seront gratuites, précises à dix mètres et la fréquence de passage du satellite sera de cinq jours. Cela va révolutionner la vie des agriculteurs", conclut Paul Bertaux.

Des méthodes biologiques pour lutter contre les insectes ravageurs

Quand il a commencé ses recherches il y a vingt ans, on le prenait (au mieux) pour un doux rêveur. Aujourd'hui, l'entomologiste Frédéric Francis est pris beaucoup plus au sérieux. Il fait partie de l'équipe de Terra, le centre de recherches d'ingénierie biologique de Gembloux Agro-Bio Tech (ULg) qui œuvre à élaborer l'agriculture du futur.

Alors, sur quoi travaille ce spécialiste des insectes? Sur les éliciteurs, les sémiochimiques et les champignons entomopathogènes. Des mots bien compliqués pour des concepts finalement simples à comprendre. "Un éliciteur est un mécanisme de défense végétal, sous la forme d'une molécule, qui permet naturellement aux plantes de se défendre contre les insectes ravageurs", mentionne le professeur Francis.

Les sémiochimiques sont à classer parmi les phéromones, ces molécules porteuses d'informations, la présence d'une proie, par exemple. "On essaie de comprendre pourquoi l'insecte ravageur trouve la plante et on tente d'empêcher ça via la diffusion, dans les champs, de molécules porteuses d'un signal de danger pour l'insecte." Quant aux champignons entomopathogènes, ce sont des tueurs d'insectes. "Leurs spores se collent sur l'animal; le champignon se développe sur le corps, ce qui entraîne sa mort."

Voici trois exemples de lutte biologique garantie sans insecticide sur lesquelles planche Frédéric Francis. Pour cela, il peut bénéficier de la structure de Terra. Ce centre, fondé en 2009, regroupe 75 chercheurs de disciplines différentes qui mènent des travaux sur l'agroalimentaire, l'environnement et l'agriculture. "Nos installations sont uniques en Europe. On y teste de nouveaux modèles d'agriculture de qualité, moins consommatrice de pesticides et moins génératrice de CO2", indique Philippe Jacques, le président de Terra.

L'Ecotron, un mini-écosystème de laboratoire

Pour ce faire, les chercheurs ont à leur disposition deux outils innovants: l'Ecotron et le réseau européen d'observatoires terrestres Icos. Le premier est un modèle d'étude des écosystèmes, reproduisant le monde réel de façon simplifiée (terre, plantes, animaux, micro-organismes, lumière, humidité, vent...). On y fait des expériences avant de les poursuivre en conditions réelles dans des champs d'essai. Le second permet d'étudier les échanges de gaz (principalement le CO2) entre les écosystèmes et l'atmosphère.

Les recherches menées au centre n'ont pas pour vocation à rester purement théoriques, au contraire. Terra va bientôt se doter d'un incubateur d'entreprises où des projets pourront être concrétisés. Celui du professeur Francis sur les champignons entomopathogènes a des chances d'en faire partie.

Afin d'offrir un meilleur confort de travail aux chercheurs de Gembloux, un bâtiment de 4000m2 est en construction juste en face du campus. Il sera inauguré en septembre 2017. Dans les cinq prochaines années, les équipes de Terra y mèneront 28 projets de recherche interdisciplinaires.


De belles économies à la clé

Adrien Pâquet est agriculteur à Dorinne, dans le Namurois. Cet ingénieur agronome de formation cultive du froment et de l'escourgeon (orge d'hiver). Il est un des fermiers pilotes de PhytoProTech. Un accès Internet, un ordinateur et un GSM lui suffisent pour bénéficier du système d'alerte des maladies fongiques. "Je peux voir l'évolution de l'incubation de la maladie, donc avant l'apparition des symptômes. Cela me permet de décider si je traite mes cultures ou pas. C'est un outil intéressant d'aide à la décision mais qui ne remplace pas l'œil", signale Adrien Pâquet. Le système utilise des données d'observation météo précises au kilomètre. Sachant que la pluie dissémine les spores de champignons et aggrave donc la propagation de la maladie, cette précision est particulièrement intéressante. "Il peut pleuvoir sur une de mes parcelles mais pas deux kilomètres plus loin." L'utilisation de PhytoProTech a permis à Adrien Pâquet de réaliser d'importantes économies. "L'année dernière, l'impasse sur le premier traitement de l'escourgeon m'a évité de débourser environ 70 euros de l'hectare, soit 1400 euros au total. Je n'ai pulvérisé qu'une seule fois au lieu de deux et de façon sûre. Cette année, c'est un demi-traitement que j'ai économisé (560 euros)." L'agriculteur se déclare "définitivement client de cette technologie quand elle sera commercialisée".


Isabelle Lemaire

 

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