75% des insectes auraient disparu...

Les insectes constitueraient à eux seuls plus de la moitié des espèces animales connues. Mais si l'Homme ne se remet pas en question, il n'y en aura bientôt plus. Les chiffres sont alarmants. Et sans insectes, il n'y a plus de nature et donc plus de vie. La ministre de l'Environnement, Carole Dieschbourg, a profité de la journée mondiale de l'Environnement hier, pour alerter et essayer de sensibiliser la population aux dangers et au sort de ces petites bestioles bien utiles, voire indispensables.

Source : Le Quotidien
Date de publication : 06/06/2018

Les tendances et les constats sont identiques dans la plupart des pays européens. Les changements climatiques, mais aussi nos modes de vie et de consommation, ainsi que la manière dont nous pratiquons l'agriculture intensifient le phénomène. Il est temps d'agir et les moyens sont nombreux et assez simples à mettre en œuvre.» La ministre de l'Environnement, Carole Dieschbourg, faisait référence à la disparition des insectes, hier à l'occasion de la journée mondiale de l'Environnement.

Sans que l'on s'en soit aperçu, 75% des insectes auraient disparu en Allemagne en 27 ans, selon une étude scientifique internationale. La situation ne serait pas bien différente au Luxembourg. «Il est grand temps de nous poser des questions», assure la ministre. En effet, la disparition de ces espèces a des conséquences dévastatrices sur l'écosystème et sur la chaîne alimentaire. Les insectes en sont des maillons importants. Ils servent notamment de nourriture aux oiseaux, qui, en corollaire, disparaissent eux aussi de plus en plus dans toute l'Europe.

Les insectes sont aussi des pollinisateurs importants. «Leur activité pollinisatrice est estimée à 153 milliards d'euros par an dans le monde et à 15 milliards d'euros par an pour le secteur agricole en Europe» , précise Carole Dieschbourg. La disparition des insectes aurait donc également des incidences économiques et des conséquences directes sur les rendements agricoles.

Les papillons sont menacés

«Sans les insectes, nos ressources alimentaires seraient fortement réduites, car il n'y aurait plus de production de graines, de fruits ou de légumes» , poursuit la ministre. Les humains seraient directement impactés, mais aussi les animaux qui se nourrissent de baies et de fruits issus de la pollinisation. Nos écosystèmes seraient donc bouleversés. D'autant plus que, sans une certaine sorte d'insectes, la terre serait couverte de matières organiques en décomposition, les sols seraient dégradés et la vie serait menacée, ajoute Carole Dieschbourg.

Les insectes ne sont donc pas que des animaux nuisibles qu'il convient d'écraser avec une pantoufle parce qu'ils piquent, qu'ils ont plein de pattes ou qu'ils ne sont pas beaux. D'ailleurs, même les beaux ne sont pas épargnés par le risque d'extinction. Une étude réalisée par le Luxembourg Institute of Science and Technology (LIST), basée sur des critères de référence objectifs de l'Union internationale pour la conservation de la nature, démontre que les papillons de jour sont en train de disparaître de nos campagnes. «Pour la première fois au Luxembourg, une liste rouge est en cours de finalisation, indique la ministre. Un papillon sur trois y figure et est donc menacé ou en danger de disparition.» Six pour cent des 89 espèces de papillons recensées au Luxembourg auraient disparu.

Un constat qui permet d'évaluer l'état des écosystèmes et des changements de l'environnement et qui est d'autant plus inquiétant pour la santé des milieux naturels et donc des espèces. «Cela commence par les plus petits et cela se répercute sur les plus grands», a conclu Carole Dieschbourg.

100 millions d'euros débloqués pour des projets

Comme l'ont dit la ministre de l'Environnement et d'autres observateurs, il est temps d'agir. Cette action est multiple et intervient à différents niveaux. Lundi, la Commission européenne a adopté la première initiative de l'Union européenne visant à enrayer le déclin des pollinisateurs sauvages. Au Luxembourg, le gouvernement a marqué son intention de ne pas laisser péricliter les écosystèmes à travers le deuxième plan national de protection de la nature et à travers la loi de protection de la nature qui devrait être votée par les députés la semaine prochaine.

«Le nombre des zones naturelles protégées a été multiplié par deux ces quatre dernières années au Luxembourg , souligne Carole Dieschbourg. Mais ce n'est pas assez, il faut des mesures concrètes et des buts. Cela implique d'investir dans la protection de la nature. Nous avons débloqué 100 millions d'euros pour la transposition de plans d'actions pour la sauvegarde et la restauration de la biodiversité.»

Le plan national prévoit le renforcement du programme de surveillance national des insectes. Il permet de recueillir des informations et d'élaborer un plan d'action dédié aux pollinisateurs. La ministre a aussi évoqué des aides financières pour les exploitants agricoles désirant contribuer à la sauvegarde de la diversité biologique ainsi que le cofinancement des projets mis en œuvre par les communes et les particuliers en faveur des insectes et de la sauvegarde de leurs habitats.

Les possibilités sont nombreuses et vont du fauchage tardif à la restauration de haies et de vergers en passant par la renaturation de cours d'eau. «Le programme national sur la biodiversité permet de passer des contrats avec les agriculteurs. Ils s'engagent à pratiquer une agriculture moins extensive. Ils ne peuvent plus mettre d'engrais, ils fauchent plus tard pour que les fleurs puissent fleurir et offrir du nectar et du pollen aux pollinisateurs, entre autres», explique Doris Bauer, du syndicat intercommunal à vocations multiples (SIAS).

Actuellement, les 16 communes du syndicat réunissent 1 050 hectares consacrés à la biodiversité. Le SIAS plante en moyenne 300 arbres fruitiers par an et reconstitue et entretient les haies. Dans les communes membres, l'équivalent de 40 terrains de football ont été plantés de fleurs diverses et de graminées sur des espaces de tailles diverses en fauchage tardif ou pas. Les résultats des engagements des divers acteurs deviennent visibles. Une grande diversité d'insectes prospère dans les anciens sites miniers du sud du Luxembourg ainsi que dans la réserve naturelle Aarnescht à Niederanven, petit paradis pour les papillons et les sauterelles.

 


SOPHIE KIEFFER

 

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