Entraînement façon science-fiction

Target, un projet européen destiné aux secours et forces de l'ordre. Tireur fou, attaque chimique, grave accident routier: les scénarios de menaces évoluent. Un programme d'entraînement en réalité virtuelle ou enrichi par la réalité augmentée a été mis au point par des chercheurs, dont une équipe du Luxembourg.

Source : Luxemburger Wort
Date de publication : 10/08/2018

 

S'entraîner à intervenir lors d'une attaque terroriste, par exemple, grâce à la réalité augmentée ou à la réalité virtuelle: les secours et forces de police de six pays européens ont pu bénéficier d'une mise en situation grâce à cette technologie qu'une équipe de huit chercheurs du LIST (Luxembourg Institute of Science and Technology), a contribué à développer, sous la direction du docteur Roderick McCall, à Belvaux.

Vous vous souvenez de Tron ou d'Avatar? Ou encore de Matrix ou Strange Days? Ces films où deux mondes se superposent: soit la réalité virtuelle, avec un décor et des personnages fictifs que vous pouvez intégrer, soit un cadre réel dans lequel on ajoute des personnages fictifs. Pour le moment, ces personnages fictifs manquent encore de réalisme. Mais la technologie progresse vite. Ces superpositions sont employées dans les films de science-fiction depuis une trentaine d'années (Tron, 1982).

Le projet s'appelle Target pour Training Augmented Reality Generalised Environment Toolkit. Il aura duré 42 mois (de mai 2015 à octobre 2018) et représente un budget de six millions d'euros, financé par l'UE et 16 partenaires de six pays de l'UE. Les chercheurs ont créé six scénarios suivant les contextes souhaités par les pays participants (France, Luxembourg, Royaume-Uni, Allemagne, Pays-Bas, Espagne, Estonie, Autriche…).

C'est au LIST à Belvaux que l'équipe du professeur McCall travaille. «Chaque pays a des installations et des scénarios un peu différents», explique-t-il. «L'Espagne a préféré entraîner ses policiers sur les prises d'otages, la France à l'arrestation de chauffards tout en préservant le public. Target permet de rendre ces entraînements spécifiques moins chers sur le plan logistique», poursuit le cher- cheur. Des grilles d'évaluation (métriques) permettent de mesurer la performance des participants lors de ces entraînements.

Casque, capteurs et programmes

Equipé de lunettes Hololens, vous visionnez la pièce telle qu'elle est réellement. Soudain, vous voyez apparaître deux personnages virtuels. L'un est armé, l'autre non. Il s'agit d'avoir la réaction appropriée. Pour les mouvements du corps, la modélisation se fait avec un «cobaye» vêtu d'une combinaison munie de capteurs qui transmettent les informations à un programme informatique. Ce système permet d'enregistrer les mouvements de la tête, du corps, des bras et jambes, mais pas de la main et des doigts qui réclament beaucoup plus de précision... et donc de travail. C'est le cas par exemple pour distinguer le mouvement du personnage qui dégaine son arme ou la range: le ou les participants à l'entraînement doivent pouvoir faire la différence.

La pièce où se déroule l'entraînement est équipée de capteurs, ainsi que les objets utilisés, comme le pistolet en plastique. Autre entraînement, celui de la détection d'une source radioactive. Dans ce contexte, cette radioactivité est virtuelle, ce qui permet de réduire les risques et les coûts. L'équipe du LIST a mis au point un faux compteur Geiger relié au programme informatique où le scénario a été intégré. Un nouveau projet de recherches a débuté en mai à Zurich, où sont développés des scénarios impliquant des armes nucléaires, radiologiques ou explosives. L'idée étant de proposer un système pour gérer des cas réels et non plus fictifs.

Pour la démonstration de la réalité virtuelle, le docteur McCall a choisi de nous présenter le scénario d'un grave accident sur une autoroute en Allemagne. Un programme d'entraînement destiné aux services de secours allemands. Muni d'un casque, vous avancez dans la pièce en tenant à la main une manette. Vous avancez à pied sur l’autoroute, vous vous retrouvez face à des gens en détresse. Outre l'impression de flottement liée aux images virtuelles, la mise en situation est vraiment dure moralement.

Ce programme ne sera pas commercialisé en tant que tel, mais son adaptation est envisagée via le Fonds national de la recherche (FNR) et son programme Jump (programme de financement ouvert à tous les domaines de la recherche, visant à créer des liens entre les découvertes des chercheurs et leur utilisation et commercialisation dans la société luxembourgeoise).

ANNE FOURNEY

 

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