MUST, une plateforme pour outiller le processus de planification urbaine avec une approche participative

Au cours de ces 20 dernières années, la population a fortement augmenté, plus de 50 % de la population mondiale vit aujourd’hui dans les villes. Et d’ici à 2050, plus de 2/3 de la population mondiale vivra dans les milieux urbains selon les projections établies par l’ONU. Il est par conséquent essentiel de s’interroger sur leur développement ainsi que les techniques de planification utilisées.

Source : Neo Mag
Date de publication : 09/12/2019

 

La planification d’un projet urbain est un exercice complexe qui nécessite l’intégration de différents aspects tels que le contexte géographique, sociopolitique, économique, les réglementations urbanistiques, le développement durable… Actuellement, il existe peu d’outils qui sont dédiés à la planification urbaine et aucun d’eux ne permet d’outiller l’ensemble du processus de conception et d’intégrer l'ensemble des points de vue à adresser. Les pratiques professionnelles associées reposent essentiellement sur l’expertise des professionnels et sont peu outillées techniquement. Il s’agit d’une démarche linéaire relativement rigide et qui peut s’avérer coûteuse financièrement, mais aussi en temps et, notamment lorsque des modifications sont apportées à un stade avancé du projet.

Pourtant, l’usage de l’informatique pourrait offrir des opportunités intéressantes aux concepteurs urbains. Tout d’abord, les outils de conception paramétrique pourraient leur permettre de simuler rapidement différentes propositions de développement urbain et simultanément d’évaluer leurs impacts sur des indicateurs (occupation du sol, mobilité, environnement, …) qui auraient été préalablement définis, et ce à chaque étape du développement du projet. Ensuite, les outils de réalité virtuelle leur permettraient de communiquer autour de leur proposition de projet urbain.

Néanmoins, la société évolue et les instances territoriales sont de plus en plus nombreuses à mettre en place des démarches participatives dans un souci de transparence du processus de décision, mais également de meilleure adhésion du collectif aux décisions prises. En effet, pour aboutir à des projets qui s’intègrent dans le tissu des villes existantes et qui satisfont les attentes des différentes parties prenantes, il est essentiel qu’il y ait une concertation avec les habitants et un dialogue entre les pouvoirs publics, les riverains, les experts et les maîtres d’ouvrage. Les outils de simulation et de réalité virtuelle précités ne sont à eux seuls pas suffisants pour supporter cette approche
participative.

C’est pourquoi le LIST travaille sur le développement de la plateforme MUST (Managing Urban Spaces Together). Celle-ci vise à répondre à cette double problématique d’outillage du processus de planification urbaine et de support à l’approche participative.

Cette plateforme propose une palette d’outils complémentaires présentés sur une table interactive et collaborative qui pourront être utilisés à différents stades de la conception. La palette comprend par exemple un outil de visualisation et d’affectation de fonctions sur un site donné, mais également un outil d’élaboration d’organigramme qui intègre des contraintes liées aux relations entre fonctions, ou encore un outil de construction de solutions formelles associées à un tableau de bord qui permet de contrôler l’adéquation de la solution proposée aux exigences fixées.

L’originalité de la technologie proposée réside dans l’intérêt d’un support informatique intelligent et intuitif qui permettra une collaboration fluide entre les experts et les pouvoirs publics d’une part et les citoyens d’autre part, ainsi qu’un aperçu des solutions possibles de conception urbaine du site.

De plus, dans une finalité de développement urbain durable, des critères liés à l’énergie, à l’environnement mais également aux facteurs humains doivent être pris en compte dès les phases amont de conception. Les études analytiques et simulations environnementales seront implémentées dans la plateforme prenant en compte des critères tels que le confort visuel, la mobilité, ou encore le bien-être.

Trois profils d’utilisateurs sont ciblés par la plateforme :
• Le secteur privé (urbanistes, architectes, experts, promoteurs…) pourra encapsuler au sein de la plateforme la connaissance locale des citoyens ainsi que leurs besoins. Il s’agira d’éléments à intégrer dans la conception des projets. Ils auront par ailleurs accès à des moyens innovants supports à la création d’un concept urbain inspiré par la société.
• Les communautés (habitants et citoyens) auront un accès facile aux données, décisions prises et principales directives ; ils seront aussi capables de communiquer avec les autres intervenants, et d’être acteurs dans le processus de conception. MUST sera également un moyen pour eux de visualiser les résultats dans un environnement immersif pour une meilleure compréhension.
• Les pouvoirs publics (administrations) seront en mesure d’engager les citoyens, dans l’évaluation des différentes propositions de projets, de proposer des méthodes interactives et innovantes pour améliorer la conception de projets urbains et enfin de suivre leur évolution au cours du processus de conception.

Les équipes du LIST ont rencontré des urbanistes et concepteurs mais aussi des structures publiques. Elles ont pu également appréhender l’intérêt des citoyens au Luxembourg et au-delà pour ces nouvelles approches mêlant technologie et participation citoyenne.

Résultant de plusieurs expérimentations menées dans le cadre du projet doctoral d’Elie Daher (LIST/KU Leuven), MUST entre aujourd’hui dans une nouvelle phase de développement et d’expérimentation, avec le support du Fonds National de la Recherche (programme Pathfinder), qui permettra d’entamer l’étude de marché visant à amener cette technologie sur le marché. 

Enfin, cette question de la planification urbaine est à positionner dans une recherche plus globale. Le LIST considère cette thématique comme l’évolution naturelle d’une recherche menée de longue date sur l’espace bâti, et sa digitalisation. Aujourd’hui, le bâtiment, tout comme les villes, requiert la mise en place de dispositifs de collecte et traitement des données d’usage. En associant les données issues de l’espace physique aux données issues des modèles virtuels, le jumeau numérique va permettre à l'avenir de maîtriser et optimiser la performance des espaces urbains dans l’intérêt de tous. 

Elie Daher

 

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