Smart Cities : un avenir à double tranchant

Carte blanche à Prof. Dr Lucien Hoffmann, Directeur du département Environmental Research and Innovation (ERIN) du Luxembourg Institute of Science and Technology (LIST) – Professeur affilié à l’Université du Luxembourg

Source : Merkur
Date de publication : 15/05/2019

 

Le développement des smart cities, ou villes intelligentes, devient une priorité pour gérer les problèmes liés à une urbanisation croissante. Parmi plusieurs définitions du concept de ville intelligente, retenons celle de l’Union internationale des télécommunications : « Une ville intelligente et durable est une ville innovante qui utilise les technologies de la communication et de l’information (TIC) et d’autres moyens pour améliorer la qualité de la vie, l’efficacité des opérations urbaines et des services, et la compétitivité, tout en veillant à répondre aux besoins des générations présentes et futures en ce qui concerne les aspects économiques, sociaux et environnementaux ». La smart city se démarque par ses spécificités au niveau de l’administration intelligente, du mode de vie intelligent, de la mobilité intelligente, des habitats intelligents, de la gestion de l’énergie intelligente. Les supports numériques, compteurs et capteurs intelligents, TIC et domotique sont au coeur de la ville intelligente. Dans ce cadre, les données sont essentielles. Dans la ville intelligente cohabitent la vidéosurveillance, les réseaux sociaux, les frigos  intelligents, les compteurs connectés, permettant de recueillir et de partager ces données au service d’une meilleure gestion de la ville. C’est donc cela, le rêve d’une ville intelligente au service de l’environnement et de ses citoyens. Mais qu’en est-il de son application ? L’implémentation de la smart city pose en effet la question de notre capacité à préserver l’intimité du citoyen du regard du reste de la société. La ville intelligente présente en effet un fort potentiel de surveillance puisqu’elle vise à s’appuyer sur des masses de données, entre autres personnelles, pour améliorer la vie urbaine. Le risque, c’est l’interconnexion totale de toutes les données sans que les personnes aient la capacité de faire valoir leurs droits. Le plus grand risque serait que les données collectées se retournent contre les citoyens qui les mettent à disposition pour des services publics, mais aussi privés. On peut facilement imaginer les dérives. L’application du Règlement européen sur la protection des données (RGPD) devrait imposer aux smart cities de réfléchir à une collecte raisonnée et raisonnable des données. La mise en place de chartes locales d’utilisation de la donnée pourrait faire partie des instruments pour concilier la nécessaire protection des individus telle qu’elle ressort du RGPD et les promesses d’une meilleure qualité de vie dans la ville de demain.

La ville durable de demain sera connectée, intelligente, mais elle devra aussi être inclusive et se construire autour et avec l’humain. Afin de relever ce défi, les citoyens ont besoin de comprendre les nouvelles technologies mises en oeuvre, ce qui pose donc in fine la question de l’éducation. Il faut donner au citoyen les moyens de la maîtrise de la smart city afin qu’il devienne un smart citizen.

 

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