Le virus coule, y compris dans l'étude Coronastep

Voilà 75 semaines que le LIST analyse la teneur en covid-19 des eaux sales arrivant dans les 13 stations d'épuration du pays. Et pour la première fois son rapport fait état d'un virus quasi disparu sur une partie des sites.

Source : wort.lu
Date de publication : 04/06/2021

 

Depuis le printemps 2020, les laborantins du Luxembourg institute of Science & Technology (LIST) ont mesuré les concentrations de SARS-CoV2 à l'entrée des stations d'épuration. Un drôle de job basé sur des prélèvements réguliers et des analyses dans la foulée. De quoi faire virer les indicateurs du vert pâle au rouge vif, au(x) pire(s) moments de l'épidémie. Mais aujourd'hui, Leslie Ogorzaly - virologue - peut affirmer que «plusieurs stations de traitement présentent un flux covid proche du seuil de détection de notre test, voire négatif».

Cette conclusion du 75e rapport du LIST sonne comme une bonne nouvelle. Est-ce bien ainsi qu'il faut la traduire? 

Dr Ogorzaly : «Effectivement. Pour certains dépistages, nous arrivons à la limite la plus basse de notre capacité de repérage du virus. Cela signifie donc que sa présence résiduelle est vraiment infime. Comme cela fait maintenant plusieurs semaines que la tendance à la baisse des charges virales est notée dans notre suivi, on peut réellement dire que le covid régresse. Mais on a parfois été surpris par les flambées qui pouvaient être enregistrées. Ce fut notamment le cas en octobre où, de semaine en semaine, l'équipe du LIST voyait les valeurs doubler, tripler...»

L'étude Coronastep va-t-elle perdurer maintenant que l'épidémie semble s'être considérablement affaiblie?

«Oui, au moins jusqu'à fin 2021. La vigilance s'impose toujours d'autant que ce virus a déjà surpris par ses remontées. Et s'il y a un intérêt pour nous, scientifiques, à étudier l'évolution des teneurs covid, il ne faut pas oublier que les mesures ont été et restent un des indicateurs particulièrement suivi par le gouvernement pour faire ses choix sanitaires. On pourrait croire que le dépistage massif du Large Scale Testing peut suffire à donner une image précise de l'évolution de la contamination, mais en fait nos mesures ont une antériorité de quelques jours pour signaler toute évolution de l'infection. Quelques jours qui comptent énormément quand il s'agit de sauver des vies.

A l'avenir, nous aimerions aussi essayer de déterminer quel variant peut être distingué ici plutôt que là. Cela peut compter beaucoup dans l'évaluation des risques de voir l'épidémie regagner en intensité.

Sans oublier que l'ensemble des échantillons prélevés restent stockés dans notre laboratoire de Belvaux, nous pourrons donc procéder à d'autres recherches de pathogènes que nous avons un peu mis de côté. Il serait par exemple intéressant de constater comment d'autres virus (gastro-entérite, hépatite, grippe) se sont comportés alors que le SARS-CoV2 dominait. Il faut capitaliser sur ce que nous avons collecté.

Quelles conclusions tirez-vous de ces mois d'analyses?

«Au fil du temps, les chercheurs du LIST engagés dans ce suivi ont pu noter que les courbes des relevés en station d'épuration et ceux du nombre de nouveaux cas de covid+ correspondaient en forme et ampleur. Il y avait donc bien une parfaite adéquation des deux mesures, humaines via le LST et techniques avec nos relevés.

Nous notons aussi que les stations où le virus a été le plus densément repéré sont souvent les plus grandes : Beggen, Schifflange, Pétange ou Bettembourg. A ce stade, il est difficile de dire si le covid était plutôt actif en milieu urbain ou en campagne. Car dans des stations plus rurales et petites, les données ont parfois été surprenantes : il suffisait de quelques personnes contaminées dans le secteur du réseau d'assainissement pour faire remonter les niveaux relevés. Je pense à des cas enregistrés à Wiltz ou Trois-Vierges qui ont pu nous surprendre.

Le modèle Coronastep luxembourgeois a-t-il été copié à l'étranger?

«On ne peut pas dire cela. Mais d'autres pays ont eux aussi mis en place ce mode de surveillance épidémiologique du covid via les eaux sales des ménages. Je pense à la France avec le réseau Obépine. Mais l'avantage d'être un petit pays nous a offert un niveau de précision que les grands Etats ne peuvent pas atteindre. 

Nous avions 13 stations à analyser contre 160 étudiées dans l'Hexagone mais pour une population 100 fois plus importante. Cela donnait forcément un degré de suivi géographique de la présence du virus bien plus élevé ici qu'ailleurs.»

Patrick JACQUEMOT

www.wort.lu/fr/luxembourg/le-virus-coule-y-compris-dans-l-etude-coronastep-60b913d6de135b92360775e3

 

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