Biodiversité: L'indicateur européen des papillons de prairie en déclin

Publié le 28/08/2015

Le "European Grassland Butterfly Indicator Report", auquel vingt-deux pays européens (faisant partie ou non de l'UE) ont contribué en fournissant les chiffres de leurs populations de papillons, vient d'être accepté par l'Agence européenne pour l'Environnement (AEE).

Au Luxembourg, le plan national de surveillance pour les espèces communes de papillons a été mis en œuvre par des chercheurs du département "Environmental Research and Innovation" (ERIN) du LIST.

En raison de leur grand nombre d'espèces et de la grande diversité de leurs besoins écologiques, les papillons, tout comme les oiseaux et les plantes vasculaires, permettent d'avoir des informations pertinentes sur le niveau de biodiversité (autrement dit, la diversité des organismes vivants) de nos espaces naturels. Leur capacité de dispersion généralement faible, la brièveté de leur cycle de vie ainsi que leurs grandes sensibilité et réactivité aux conditions climatiques font aussi des papillons de très bons bio-indicateurs des changements environnementaux. De plus, les papillons sont emblématiques, reconnaissables et donc facilement identifiables dans la nature.

Le "European Grassland Butterfly Indicator" représente l'un des indicateurs de biodiversité de l'UE utilisés par l'Agence européenne pour l'environnement (AEE). Des données sur dix-sept espèces de papillons de prairies ont été exploitées pour évaluer les tendances quantitatives entre 1990 et 2013. Parmi ces dix-sept espèces, "dix sont en déclin dans l'UE, trois sont restées dans une situation stable et trois sont en augmentation. Pour l'une des espèces, la tendance est incertaine". À l'échelle européenne, la quantité de papillons de prairies a diminué de 30 % depuis 1990 (Fig. 1). Toutefois, la courbe descendante montre un ralentissement de ce déclin au cours des 5 à 10 dernières années.

Figure 1. L'indicateur paneuropéen basé sur les papillons (espèces des prairies) de 1990 à 2013.

 

Les deux principales raisons qui expliquent ce déclin sont l'" intensification agricole dans les zones où la terre est relativement plane et facile à cultiver, ainsi que la déprise agricole dans les zones humides et les zones montagneuses, principalement en Europe de l'Est et du Sud. ".

"L'intensification agricole engendre des prairies uniformes, presque stériles pour la biodiversité. La fertilisation réduit la diversité végétale (cela concerne aussi bien les plantes hôtes que les sources de nectar) et l'arrêt de la fenaison au profit de méthodes d'ensilage plus rentables est particulièrement néfaste. Les papillons des prairies survivent donc principalement dans des systèmes agricoles traditionnels utilisant peu d'intrants (agriculture à Haute Valeur Naturelle : HVN) ainsi que dans des réserves naturelles, et dans des zones marginales telles que les bords de routes et les aires de loisirs."

Compte tenu des tendances quantitatives décrites ci-dessus, les recommandations suivantes sont données :

  • Développer la protection des dernières prairies semi-naturelles et améliorer les programmes de restauration et de remise en état des prairies qui ont été détériorées ;
  • "Les États membres peuvent choisir d'identifier, de désigner et de protéger des " Prairies écologiquement sensibles" dans le cadre des réformes de 2013 de la politique agricole commune [...] afin d'éviter la perte d'autres prairies HVN et d'encourager la restauration." Cela comprend un soutien financier plus important pour l'agriculture HVN.

"Les papillons peuvent être utilisés comme indicateur structurel général, pas seulement pour les prairies, mais aussi pour les autres habitats, et ils permettent d'évaluer les politiques agricoles et de suivre les autres éléments influant sur l'environnement tels que les changements climatiques."

Le rapport complet est disponible ici.

 

Le plan pour les papillons communs au Luxembourg

En 2010, le Centre de Recherche Public Gabriel Lippmann, qui fait aujourd'hui partie du Luxembourg Institute of Science and Technology (LIST), a mis en œuvre un plan national de surveillance pour les espèces de papillons communes, avec l'aide financière du Ministère du Développement Durable et des Infrastructures. La stratégie d'échantillonnage pour ce plan de surveillance se base sur une méthode définie par des normes internationales, consistant à compter plusieurs fois les papillons dans des transects de +/- 2,5 km représentatifs des paysages luxembourgeois.

Figure 2. Les tendances quantitatives au Luxembourg de deux espèces de prairies communes. La valeur de référence de l'année 2010 est de 100.

La Fig. 2 montre que les populations de papillons ont également diminué au Luxembourg. Cependant, la variabilité interannuelle des quantités de papillons étant généralement élevée, les tendances doivent donc être analysées sur une période plus longue. Grâce à des analyses supplémentaires, nous pourrons également distinguer les tendances des populations en fonction des types d'utilisation du sol (par ex. : prairies, cultures, zones urbaines), des régions (par ex. : Oesling, Gutland, Minette) ou même en fonction des politiques environnementales (par ex. : réserves naturelles, directives européennes, mesures agro-environnementales, etc.).

En 2015, 30 transects à travers tout le pays seront surveillés pour la 6ème année. Il n'est pas trop tard pour s'impliquer : il est aujourd'hui scientifiquement prouvé que la diminution de la biodiversité a des répercussions sur le fonctionnement des écosystèmes, et donc sur certains des avantages que ces derniers offrent aux humains. Ainsi, des données supplémentaires sont essentielles pour surveiller les changements environnementaux qui pourraient contribuer à cette diminution de la biodiversité. Ceci est particulièrement important à notre époque, marquée par des changements rapides à l'échelle mondiale (notamment au niveau du climat, de l'utilisation du sol, de la politique agricole commune...) !

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