Le Luxembourg à l'avant-garde de la course à l'espace du XXIè siècle

Publié le 03/05/2018

L'exploration spatiale a longtemps été considérée comme une extension des rivalités géopolitiques entre les pays, en particulier lors de la période de développement rapide des années 1950 à 1970, marquée notamment par l'apparition des premiers satellites et alunissages. Cependant, la conscience croissante des importantes applications de la science dérivée de l'observation et de l'exploration spatiales pour la vie sur Terre a motivé une collaboration accrue entre les pays au cours des dernières décennies, et notamment entre les gouvernements et les sociétés privées.

L'exploration spatiale peut apporter des réponses à des enjeux critiques auxquels notre planète Terre est confrontée, notamment l'épuisement de certaines ressources, comme les métaux et les minéraux utilisés en quantité toujours croissante par les secteurs électronique et automobile. Les gouvernements et les sociétés mènent des recherches sur la présence éventuelle, sous la surface de la Lune et dans d'autres corps à proximité de la Terre, en particulier dans les astéroïdes, d'importantes quantités de métaux tels que le fer, le nickel, le tungstène, le cobalt et les terres rares, ainsi que d'ammoniac, de nitrogène, d'hydrogène et d'autres gaz.

Les recherches scientifiques permises par l'exploration spatiale ont depuis longtemps conduit à des applications pratiques sur Terre : par exemple, les systèmes d'intelligence artificielle élaborés pour préparer les astronautes à l'espace sont à présent employés pour résoudre des crimes. Les projets de miniaturisation entrepris pour faciliter le lancement des satellites et d'autres charges utiles ont des retombées positives dans des domaines tels que la médecine et l'industrie.

Outre ces tendances, une révolution a eu lieu dans le secteur du lancement spatial. SpaceX d'Elon Musk, ainsi que d'autres sociétés privées, a remis en question à la fois les technologies et l'économie des acteurs établis du secteur public, en récupérant et en réutilisant pour la première fois les composants des lanceurs, réduisant ainsi considérablement les coûts des missions spatiales, et permettant l'expansion à un moment où les programmes spatiaux nationaux subissent des contraintes budgétaires.

L'attraction terrestre pour le secteur spatial

Dans ce contexte, le Luxembourg a lancé il y a deux ans son initiative SpaceResources.lu, afin de soutenir les efforts du secteur privé pour identifier des ressources précieuses dans les corps astraux, y accéder et les recueillir. La législation, qui est entrée en vigueur en août 2017, clarifie légalement pour les sociétés la question de la propriété et de l'usage de leurs découvertes, établie un cadre juridique et statutaire pour l'autorisation et la supervision de l'exploration spatiale et des activités d'extraction des ressources.

Outre les filiales européennes des principales start-up d'exploitation minière des astéroïdes, le Grand Duché accueille désormais des entreprises dans des domaines allant des données spatiales et du développement de nano-satellites à la fabrication en orbite et à l'exploration lunaire. Le gouvernement a également conclu des accords de coopération spatiale avec le Japon, les Émirats Arabes Unis et la Chine. D'autres pays emboîteront certainement le pas. 

Le Luxembourg, sans conteste à l'origine du paysage actuel de la diffusion et des télécommunications par satellite grâce à la création en 1985 de la Société Européenne des Satellites, désormais le plus grand opérateur de satellites du secteur privé, est un membre actif de l'Agence spatiale européenne et en particulier de son programme ARTES visant à développer des systèmes et services innovants de communication par satellite. Le gouvernement encourage le développement des activités spatiales via différentes initiatives de soutien financier, la plus récente étant un projet de fonds de capital-risque dédié à l'espace.

Un banc d'essai spatial pour les revêtements ultra-noirs

En tant qu'organisation nationale dédiée à la recherche et à la technologie, le Luxembourg Institute of Science and Technology (LIST) est au cœur des efforts de R&D liés à l'espace, notamment de la collaboration avec l'ESA. Quatorze projets sont actuellement en cours avec l'agence européenne, et d'autres sont à venir. 

Un exemple notable de collaboration entre le LIST et l'ESA est un projet de développement de revêtements ultra-noirs pour les instruments et appareils optiques ultrasensibles. Les solutions actuelles, comme les peintures noires et l'anodisation, peuvent être chères, provoquer des contaminations, et sont difficiles à appliquer à des pièces mécaniques complexes. Ces dernières années, les nanotubes de carbone ont émergé en tant que technologie de revêtement ultra-noir présentant moins d'inconvénients.

L'espace est un environnement de test essentiel pour de tels revêtements. Ils doivent être résistants à l'oxydation et offrir une cohésion et une adhésion suffisamment élevées, ainsi qu'une compatibilité avec différents substrats, des températures de traitement allant jusqu'à moins 400°C, et des structures tridimensionnelles complexes. Les matériaux et processus brevetés offrent un excellent potentiel pour des applications impliquant la réduction des lumières parasites.

Un logiciel avant-gardiste d'observation de la Terre

Mais le LIST n'envisage pas seulement l'espace d'un point de vue scientifique matériel. À l'occasion du lancement de la mission ENVISAT par l'ESA, le LIST a lancé une activité de recherche visant à l'amélioration, au moyen des données du satellite Earth Observation (EO), de la gestion opérationnelle des inondations à grande échelle. 

Le service de cartographie des inondations et d'évaluation des risques d'inondation HASARD® qui est à présent mis en place sur la plateforme Grid Processing On Demand (GPOD) de l'ESA et mis à disposition des utilisateurs externes pour traiter le flux de données venant des satellites  COPERNICUS EO, est le résultat de nombreuses années de collaboration entre le LIST et l'ESA. Aujourd'hui, HASARD® permet la cartographie systématique, automatique et fiable, via le Synthetic Aperture Radar (SAR) spatial, des corps aquatiques terrestres pour favoriser la réduction des catastrophes liées aux inondations à l'échelle mondiale. 

La valeur du service de cartographie HASARD a été démontrée efficacement dans le cadre de grandes inondations qui ont touché de nombreuses parties du monde l'année dernière. Par exemple, les événements liés aux ouragans Harvey et Irma ont récemment fourni une grande quantité d'images couvrant les larges régions touchées. Interpréter ce flux quasi-continu de données en temps opportun grâce à HASARD® a permis d'obtenir des informations critiques pour soutenir les prises de décision des autorités nationales aux USA.

Une technologie brevetée pour un rover lunaire

L'institut est également impliqué dans un autre projet spatial puisqu'il a conclu un partenariat stratégique avec la société d'exploration lunaire japonaise ispace autour d'un spectromètre itinérant servant à prospecter et à analyser des ressources lunaires comme la glace et les dépôts de roche et de poussière à la surface. Le développement de ce spectromètre par le service Material Research and Technology du LIST intègre les technologies et l'expertise protégées par deux brevets accordés l'année dernière dans le cadre du portefeuille d'actifs du LIST2.

Ce projet vise à créer un détecteur de plan focal uni-dimensionnel déployable dans l'espace pour le spectromètre haute performance de masse compacte du LIST, qui sera intégré dans un micro-robot itinérant ispace. Le programme devrait également contribuer à des avancées dans les instruments haute résolution, haute sensibilité et de nano-analyse.

Avec plus de 30 sociétés à présent actives dans le secteur de l'espace et impliquées dans des activités de recherche et de développement révolutionnaires, le Luxembourg offre aux entreprises une combinaison inégalée d'expertise scientifique, de stabilité juridique et réglementaire, et de ressources et de capacités financières, sans compter la volonté politique de contribuer à ce qui compte parmi les plus grands défis et opportunités du XXIe siècle. Le LIST s'engage à approfondir sa collaboration avec des entreprises high tech dans le Grand Duché et à développer davantage son portefeuille de brevets liés à l'espace.

 


> Cet article est le TECH WATCH, l'article phare du LIST Quarterly - la première édition de la newsletter digitale du LIST publiée début mai 2018.

 

 

1 N. Bahlawane, “Carbon-nanotube-based composite coating and production method thereof”, WO201701406 publié le 5 janvier 2017.
2  H.Q. Hoang, D. Dowsett, T. Wirtz, “Mass spectrometer with optimized magnetic shunt” EP2943970 accordé le 8 mars 2017, and H.Q. Hoang, D. Dowsett, T. Wirtz, “Mass spectrometer with improved magnetic sector” EP2943971 accordé le 10 mai 2017.

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