Luxembourg : Un lieu unique au monde pour résoudre les mystères du cycle de l’eau

Publié le 21/11/2019

Au vu de l’impact des changements globaux sur les ressources en eau, il est urgent de mieux comprendre les processus hydrologiques : Où va l’eau quand il pleut ? Quel chemin d’écoulement emprunte-t-elle jusqu’au cours d’eau ? Quel âge a-t-elle dans le cours d’eau ? Répondre à ces questions est essentiel pour garantir une gestion efficace des ressources en eau en matière de qualité et de durabilité. De la quantité d’eau potable disponible dans les réservoirs à la qualité des cours d’eau, l’équilibre du cycle de l’eau joue un rôle clef. A titre d’exemple, la viticulture, ou toute autre forme d’agriculture, dépend étroitement de ce cycle et du temps passé par l’eau dans le sol. Un grand nombre de secteurs peuvent ainsi être affectés, de même que l’équilibre de chaque écosystème.

Les conséquences du changement climatique, de l’utilisation des sols ou encore de la présence de produits chimiques dans l’environnement seront définies par les réponses à ces questions fondamentales. Pour ce faire, les scientifiques du LIST effectuent à la fois des recherches novatrices et un suivi de la situation luxembourgeoise. Doté d’une grande expertise en hydrologie et d’un champ expérimental naturel unique, le LIST représente un lieu attractif pour des chercheurs de renommée internationale. Jeffrey McDonnell, professeur d’hydrologie à l’Université de Saskatchewan (CA) et directeur associé du Global Institute for Water Security, est venu au Luxembourg en tant que chercheur invité dans le groupe de recherche de Laurent Pfister au cours des dix derniers mois. Il a répondu à nos trois questions:

Pourquoi le Luxembourg est-il un lieu convoité internationalement par les hydrologues ?

Des hydrologues de tous horizons viennent au Luxembourg pour étudier son environnement naturel. Les bassins hydrographiques, à la géologie diverse et variée, disposent d’un climat et d’une utilisation des sols homogènes. Il s’agit d’un site expérimental unique dans lequel grès, schistes et marnes se côtoient dans des bassins versants voisins. Telles des éponges aux propriétés différentes, les grès peuvent stocker une très grande quantité d’eau, tandis que des roches très compactes comme la marne sont presque imperméables à l’eau. Par conséquent, le stockage de l'eau souterraine varie considérablement d'un bassin hydrographique à l'autre. Dans un lieu aussi inhabituel, les hydrologues peuvent commencer à répondre à des questions de recherche mondiales. Dans le but de comprendre comment les paysages vont réagir au changement climatique, Laurent Pfister (LIST) et moi-même travaillons en étroite collaboration sur le stockage des bassins versants et la libération de l'eau à travers ces différents types de roches.

Comment les variations des débits des cours d’eau luxembourgeois sont-elles surveillées ?

Nous pouvons suivre la molécule d'eau et son mouvement dans le cycle hydrologique en utilisant les isotopes stables de l'oxygène et de l'hydrogène, qui font tous deux partie de la molécule d'eau. Ces traceurs enregistrent la signature du débit et la réponse aux pluies antérieures ou à la fonte des neiges. Les isotopes stables seront en effet légèrement différents en fonction de l’origine de l’eau (p.ex. eaux souterraines ; fonte des neiges). Cependant, les enregistrements actuels sont très courts. Un domaine de recherche prometteur, fondé sur de nombreuses années de travail des scientifiques du LIST, vise à utiliser la coquille des moules comme un enregistreur de la composition isotopique des cours d’eau. Si les chercheurs pouvaient affiner cette méthodologie pour comprendre les variations annuelles ou sub-annuelles grâce à l'enregistrement isotopique au niveau de la coquille des moules (qui est directement liée à l'environnement du cours d’eau), cela ouvrirait de toutes nouvelles voies dans la compréhension du comportement de nos systèmes.

Comment garantir une gestion durable des ressources en eau ?

En matière de gestion durable des ressources en eau, il est essentiel de prendre en compte non seulement le débit des cours d'eau, mais aussi les eaux souterraines, leur âge et la source d'absorption de l'eau par la végétation. Dans les aquifères de grès du Luxembourg, certaines eaux ont été datées de 33.000 ans. Cette eau a certainement été rechargée avant l’arrivée des sociétés modernes, avec un climat différent et une autre période géologique. Connaître l'âge de l'eau des aquifères est donc d'une grande importance pour garantir une utilisation durable des ressources en eau. La végétation joue également un rôle clef dans le cycle de l'eau. En effet, la moitié de l’eau quitte probablement le bassin versant par le mécanisme d’évapotranspiration des arbres. Si l'on gère le débit des cours d'eau ou si l'on pense aux taux de recharge des eaux souterraines, le mouvement de l'eau hors du sol et dans l'atmosphère par la végétation a un grand impact. Le groupe de recherche du LIST est le leader mondial dans ce domaine et ce fut un plaisir ainsi qu’un honneur d’en faire partie au cours de cette année 2019. Je me réjouis à la perspective de nombreuses autres années de collaboration fructueuse.

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Dr habil. Laurent PFISTER
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