Si le battement de leurs petites ailes proverbiales dans un coin du monde peut prédire une tornade dans un autre (cf. l'"effet papillon"), les papillons sont également d'excellents indicateurs de l'état de notre environnement. Et si les dernières découvertes se confirment, le tableau est plutôt sombre. Le nombre de papillons des prairies en Europe diminue, selon le dernier indicateur européen des papillons des prairies, qui évalue la santé des prairies européennes. Le rapport a été coécrit par des chercheurs du LIST et compilé par l'association Butterfly Conservation Europe.
« Nous travaillons avec le ministère luxembourgeois de l'Environnement, du Climat et du Développement durable depuis 2010 dans le cadre de nos programmes de surveillance de la biodiversité », explique Xavier Mestdagh, co-auteur du rapport, « et nous utilisons une méthode standardisée appelée "Pollard Walk" pour réaliser les inventaires de papillons. »
Nommée en l'honneur d'Ernie Pollard, qui a conçu cette méthode dans les années 1970, ces marches transects sont utilisées dans le monde entier pour enregistrer le nombre de papillons.
En Europe, les papillons sont comptés par des citoyens et des professionnels dans les différents pays ou régions, et ces comptages sont centralisés par Butterfly Conservation Europe. Ces relevés standardisés, le plus souvent effectués par des citoyens, sont ensuite intégrés dans des analyses statistiques afin de produire des indicateurs de la santé de la nature et de la biodiversité.
« Les papillons sont des bioindicateurs très utiles en raison de leur cycle de reproduction rapide, avec généralement une ou deux générations par an », ajoute Sarah Vray, co-auteur de l'étude. Par conséquent, tout changement environnemental peut être détecté plus rapidement que chez des espèces telles que les oiseaux ou les mammifères, dont la durée de vie et les cycles de reproduction sont plus longs. En outre, les papillons sont relativement faciles à observer et peuvent être trouvés dans divers habitats, montrant souvent une spécificité à des plantes particulières ou à des conditions environnementales telles que la température et l'humidité.
Au Luxembourg, le LIST coordonne les programmes de surveillance des papillons, mais l'association natur&ëmwelt a.s.b.l. et un nombre croissant de citoyens bénévoles participent à des promenades transects pour collecter des données dans le but de produire un indice standardisé de l'abondance des papillons au fil du temps, contribuant ainsi à l'élaboration du rapport.
Les résultats à l'échelle européenne suggèrent que l'indicateur a connu une chute importante au cours des dernières décennies. L'abondance des papillons a diminué de 36 % depuis 1990 dans toute l'Europe au cours des dix dernières années, et de 32 % dans l'ensemble des États membres de l'UE. Les défenseurs de l'environnement attribuent ce phénomène à l'intensification de l'agriculture, à l'abandon des terres et à l'intensité des vagues de chaleur et des sécheresses, en grande partie dues au changement climatique.
Il y a cependant de l'espoir, car l'indicateur va être adopté dans le cadre de la future loi européenne sur la restauration de la nature, qui vise à lutter contre le déclin des populations d'insectes pollinisateurs sauvages et à rétablir l'équilibre des écosystèmes. La législation proposée comprend des objectifs concrets visant à inverser la tendance.
Le rapport, à consulter ici, a été corédigé par Xavier Mestdagh, Sarah Vray et Nicolas Titeux, du département "Recherche et innovation environnementales" du LIST.